jeudi 3 février 2011

VOUS QUI ME PROVOQUEZ…

Vous qui me provoquez, qui voulez m’approcher,
Me voilà devant vous ; venez et écoutez :
Je suis l’illimité, je suis l’être absolu
Je suis ce qui respire sans y être tenu.
Je suis fait de passé, de présent, d’avenir,
Ce que rien ni personne ne pourrait soutenir.

Vous qui me provoquez, venez et écoutez :
J’ai toujours été là, et je vous regardais :
Je suis terre, sang et eau, je suis pourpre et tonnerre,
Et je suis immobile, j’expose mon mystère.
Devinez qui je suis, écoutez bien la fable :
Je suis fait d’étincelles, de foudre, d’eau et de sable…
Image du passé, mystérieuse effigie,
Je suis proche et lointaine, je me ris de la nuit.
Sous mes griffes je tiens l’être, mais aussi le non-être.
Regardez, écoutez : vous devinerez peut-être…

VENGEANCE

Moi, je serai le feu, pour mordre l’entourage
Je lécherai la peau de ceux qui te font mal
Je la ferai craquer sous mes dents de brûlance.


Moi, je serai le fleuve, et je les noierai tous
Et d’un grand coup de vague je saurai balayer
Toute la cruauté qui habite leur ventre.

Moi, je serai la terre, et je me ferai boue
Pour mieux les étouffer, pour mieux les rendre sourds
Enveloppant leur corps et emplissant leur bouche.

Alors tu seras grand, beau et puissant mon frère
Et je t’aurai vengé, moi qui n’existe plus.
Mais j’aurai su t’aimer, tu n’as rien demandé.
Tu voulais tout donner.

SOIR D AVEU

Quand le ciel et la mer se seront mélangés
Que l’étoile d’un soir aura vaincu l’errance,
Je te dirai sans doute où l’égarement commence
Quand l’univers entier se sera embrasé.

Pour n’avoir jamais pu dominer ta souffrance
Tu riras à la lune, tu riras à la nuit
Dans l’éclatement brutal de ton âme meurtrie
Tu t’élanceras encore vers un peu de jouvence.

Auras-tu le courage d’affronter la douleur
D’éprouver à nouveau l’angoisse de ton cœur
Là où ton âme encore brûle de liberté ?

Dans un souffle de vie qui meurt d’avoir trop ri
Ecrase le néant, écrase l’infini
N’attends plus à demain. Il faut te libérer !

PIÈGE AU LOUP

Quand le ciel et la mer se seront mélangés
Que l’étoile d’un soir aura vaincu l’errance
Je te dirai alors où l’égarement commence
Quand l’univers entier se sera enlisé.

Tu riras à la lune, malheureux supplicié,
Pour n’avoir jamais pu diminuer ta souffrance.
Tu t’élanceras encore vers un peu de jouvence
Dans l’éclatement sourd de ton âme damnée.

Auras-tu le courage d’affronter la douleur
D’éprouver à nouveau l’angoisse et le malheur
Quand ton âme enflammée brûle de liberté ?

Repousse le néant, écrase l’infini
Ou jamais ton destin ne sera validé
Saisis donc ton bonheur de tes deux mains meurtries !

PENDANT COMBIEN DE TEMPS ?

Pendant combien de temps
Vais-je crier ton nom ?
Pendant combien de temps
Te mentirai-je encore
En parlant d’amitié
En pensant à l’amour ?
Pendant combien de temps
Vais-je noyer mon âme
Dans tes yeux de cannelle
Dis ami, dis mon frère ?
Pendant combien de temps
Partirons-nous ailleurs ?
Pendant combien de temps
Parlerons-nous de ceux
Qui nous blessent et nous tuent
Ecrasant dans leurs doigts
Nos deux cœurs dévorés ?
Toutes les mains du monde
Et tous les yeux mauvais
Ne réussirons pas à tuer cet amour
Qui se ronge et se creuse
Sans jamais exister.
Tous les démons du monde
Et leurs tentations noires
Ne pourront séparer
Deux amis qui se cherchent.
Le monde est gris, ami
Mais ton regard puissant
Ecarte les nuages
Et efface les pleurs
Il ne faut pas se perdre
Il ne faut plus rester
Il ne sert plus à rien
D’écouter et de plaindre
Il ne faut que rêver
Et il ne faut qu’aimer

…Ne jamais oublier.

PAGE.

Dans la pièce vibrante, éternelle prison
Où mon âme se heurte en petit chat sauvage,
Dans l’éclatement sourd qui se veut évasion,
On est venu soudain en dépit de mon âge.


Et le vent au dehors fait trembler le feuillage,
Qui se tord vers le ciel en rumeurs gémissantes.
Le vent velu est né de l’étreinte aveuglante
Des flots noirs mugissants qui se heurtent au rivage.


Sur la page tournée, quelques mots d’oraison
Là où le principal est déjà un adage
Pourtant, c’est en aveugle que je perds la raison
Et c’est dans le brouillard que se tourne la page.


Une page de vie qu’on détruit avec rage,
Une sourde grimace que l’on a remplacée
Par un bout de linceul arraché aux nuages
Et collé à la place d’une main aux doigts gourds.


Pour une tranche sale d’un peu de soumission
Il manque depuis lors au cahier une page.
Pour un désir brûlant tendu vers sa mission
Le petit enfant lâche oublia d’être sage.

MOUVEMENTS.

Lorsque vient le soleil, et avec lui le rire,
Alors les corps présents chantent l’amour de vivre.
C’est alors un moment d’envol écervelé
Qui détruit d’un coup d’aile ce qui fit la pensée.


Mais après le soleil nous reviendra la pluie.
Ecrasant de ses dards toute frivolité
La sournoise ramène la folle du logis
Qui s’accroche à nos âmes et fait naître l’idée.


Et quand survient la neige, porteuse de sa lyre,
Sur nos âmes blessées épandant nos soupirs,
Tout s’endort ,tout repose dans les jardins glacés
En attendant la mort qui vient nous consoler.


Elle arrive, mordante, pour choisir un mari :
Toutes les têtes se lèvent pour regarder passer
La déesse aux yeux blancs qui vient choisir celui
Qui partagera sa couche. Comme il se sait damné,
Celui qu’hier, hélas, elle choisissait ici !



Mais elle passe, géante : à tous elle a parlé
Et la meute criante tremblante et apeurée
Monte dans le bateau qu’elle conduit sans désir
Au seuil de l’infini, au pays du délire.